« La fête du travail »… Depuis que je suis parmi les deux-pattes, cette expression revient chaque année à la date du 1er mai. Or je suis chat et « travail » n’est pas un mot que j’affectionne ; d’autant plus qu’au cours du dernier siècle, le 20ème, il s’est connoté de certaines couleurs immondes, revenant en cela à ses origines. Quelles sont donc ces origines ?
Travail : définition
Je me réfère, comme à chaque publication, à celle donnée par le Petit Robert 2013 :
Vient du bas-latin trepalium, variante de tripalium « instrument de torture »
- État pénible
- État d’une personne qui souffre, qui est tourmentée ; activité pénible.
- Période de l’accouchement pendant laquelle se produisent les contractions utérines aboutissant à l’expulsion du fœtus.
- Ensemble des activités humaines orientées vers un but
- Ensemble des activités humaines coordonnées en vue de produire qqch.
- Le travail de (qqch.) : action ou façon de travailler une matière ; de manier un instrument.
- Un travail, le travail de qqn : ensemble des activités exercées pour parvenir à un résultat.
- Manière dont un ouvrage, une chose faite par l’homme, ont été exécutés.
- Ouvrage. Travaux d’art : constructions de travaux publics. Ouvrages de l’esprit (considéré comme le résultat d’une suite d’opérations intellectuelles).
- Les travaux (du sens 1)
- Entreprises difficiles et glorieuses (les travaux d’Hercule) ;
- Suite d’entreprises, d’opérations exigeant l’activité physique suivie d’une ou plusieurs personnes et l’emploi de moyens particuliers (Grands travaux, travaux publics, travaux forcés) ;
- Suite de recherches dans un domaine intellectuel (Travaux pratiques, travaux dirigés…)
- Le travail. Activité laborieuse.
- Activité laborieuse, professionnelle et rétribuée (emploi, fonction, gagne-pain, métier, profession, spécialité ; boulot, job, turbin).
- Activité économique des hommes (aidés ou non par les machines), organisée en vue de produire des biens et des services répondant aux besoins individuels et collectifs.
- L’ensemble des travailleurs considérés dans le groupe social (« population active ») , les travailleurs salariés des secteurs agricole et industriel (ouvrier, paysan, prolétariat, main-d’œuvre).
- En sciences
- Action continue, progressive (d’une cause naturelle), aboutissant à un effet que l’on peut constater (le travail du bois, le travail des eaux…).
- Le fait de produire un effet utile, par son activité.
- Produit d’une force par le déplacement de son point d’application.
La fête du travail
Il est de bon ton, le premier mai, de parler de « La fête du travail ». Or, ami lecteur, tu as pu le constater en lisant ces définitions, la notion de ce petit mot, « travail », est pour le moins ambigüe. Il puise son étymologie dans un terme plutôt inquiétant « tripalium », qui signifie « torture ». Il est bon aussi de savoir que c’est le régime de Vichy qui a a officialisé cette appellation de « Fête du travail » le 1er mai 1941, sous occupation nazie.
Le travail et le chat
Je parlerai de mon point de vue : je déteste ce terme. Dès son origine, il est dévoyé (par ce « tripalium »). La dernière guerre mondiale deux-pattes a renforcé cette perversion. Je citerai deux formules qui ont totalement corrompu la valeur-travail :
- « Travail, Famille, Patrie », le slogan de l’État Français, collaborateur avec l’occupant nazi, sous Pétain, en 39-45, a remplacé la devise de la République Française « Liberté, Égalité, Fraternité » ;
- À l’entrée du camp d’extermination d’Auschwitz, tous les déportés pouvaient lire : « Arbeit macht frei » (littéralement « Le travail rend libre »).
Travail = torture. Cette corrélation en a ainsi été renforcée. Constate aussi, ô lecteur, la perversion de ce slogan arboré dans ce camp de sinistre mémoire. Selon la logique de cette expression, la liberté est produite par le travail, c’est-à-dire par la torture. Or, le travail facilitait l’extermination. À ce sujet, en 1994, lors du génocide au Rwanda, les génocidaires, quand ils allaient découper leurs victimes, disaient qu’ils partaient au travail.
Le premier mai et le muguet
La tradition du muguet remonte au XVIème, avec son instauration en 1561 par le roi Charles IX, qui reçut à cette date, en guise de porte-bonheur, un brin de muguet.
Cette fragrance délicate et légèrement entêtante est synonyme de retour des beaux jours. Elle surgit le 122ème jour de l’année, alors qu’il en reste 244, soit exactement en son tiers.
Je ne sais pas pour toi, lecteur, mais je préfère rattacher cette journée au muguet plus qu’au travail. Offrir ces petits clochettes d’une blancheur immaculée à ceux qu’il aime est un plaisir que goûte chaque deux-pattes. Car ce muguet porte bonheur, et qui ne souhaite le bonheur de ses proches ?
Remarques
Petit rappel sur cette date du premier mai
Cette journée devrait plutôt se nommer « Fête des luttes des travailleurs » plus que « Fête du travail ». En effet, le 1er mai 1886, une grève pour la journée de 8h est lancée à Chicago aux États-Unis. Le 20 juin 1889, la IIème Internationale socialiste réunie à Paris, cent ans après la Révolution Française, décide, en hommage à cet événement de 1886, de faire du 1er mai la journée de revendication pour obtenir la journée de huit heures. C’est de là que date cette commémoration.
Déplacement sémantique
De même que la « Journée internationale des droits des femmes » est devenue la « Journée de la femme », affaiblissant ainsi la valeur symbolique de cette commémoration, il me semble que la « Fête du travail » devrait s’appeler la « Fête des luttes pour les droits des travailleurs ». Cela éviterait l’introduction ambigüe de ce substantif qui, hors de tout contexte, peut se révéler négatif.
Des substantifs justes
Labeur
Labeur résonne comme labourage. Travailler la terre a un sens : il faut la fatiguer (comme les normands disaient « fatiguer la salade »). Accomplir son labeur, même si le terme a longtemps été connoté comme plus dur que le travail, me paraît plus juste, aujourd’hui.
Plaisir
Toute tâche, quelle qu’elle soit, s’accomplit avec facilité, aussi complexe ou difficile soit-elle, quand elle est réalisée avec plaisir. C’est le plaisir (la raison du plus fort, à l’origine) qui nous guide et nous porte avec la plus belle énergie, dès l’instant où il est intérieur.
Merci Eschylle pour ce rappel.
Je pensais que la fête du travail puisait son origine en 1936…Variante, sur les barricades de la révolution de 1870..
De savoir que cela vient de pétain me donne envie de ne pas chômer ce jour…
De toute façon, pas de muguet ici.
Belle journée à toi.:)
Bienvenue à toi !
Beaucoup de deux-pattes pensent comme toi. Parfois, ils confondent même la commune de 1871 et la guerre de 1870…
Pour la référence au Maréchal, ne t’inquiète pas, le Conseil de la résistance a maintenu la décision.
Très joli mois de mai à toi !
Merci pour cet article très intéressant Cher Eschylle..je vous envoie un petit bouquet de muguet porte-bonheur..
Je le reçois avec plaisir.
Que quelques petites clochettes tintinnabulent et te portent bonheur, chère Courtois.